Stefania MONTECALVO, Università degli Studi di Foggia, Italie
Né à Mormoiron en 1746, Guillaume-Emmanuel-Joseph Guilhem de Clermont-Lodève, baron de Sainte-Croix, faisait autorité auprès de ceux qui se destinaient à l’étude de l’Antiquité ainsi qu’auprès des spécialistes. Trois manuscrits du fonds Nouvelles acquisitions français de la Bibliothèque nationale de France contiennent les papiers que Sainte-Croix avait légué à son ami intime, le célèbre orientaliste Sylvestre de Sacy. Il s’agit de manuscrits 1030, 3234 et 4062. Pour ce qui est de la philosophie, le respect pour la tradition catholique que Sainte-Croix manifesta pendant ses dernières années fait même comprendre la perspective d’un mémoire inédit sur la philosophie grecque à Rome (Paris, BNF, ms. NAF 3234). C’était déjà sa conviction, déjà étayée dans les déclarations parsemées dans les précédents ouvrages, que, à partir des âges les plus reculés, l’homme avait l’idée d’une divinité unique, ainsi que de la providence et de la vie future. Au début de ce mémoire on trouve des formulations analogues et la réfutation du matérialisme, surtout de la philosophie d’Épicure. Comme dans les mémoires sur la législation de la Grande Grèce, où il avait suivi l’histoire de l’école de Pythagore, dans ce mémoire, il reprend surtout le témoignage de Cicéron pour esquisser un tableau de la philosophie grecque et de sa diffusion à Rome, ainsi que de la culture latine. Si l’orientation est anti-épicurienne, on peut reconnaître tout au long de l’ouvrage des allusions à la Révolution française. L’épicurisme correspond donc au « philosophisme », à l’excès imputé aux philosophes du XVIIIe siècle d’avoir contribué à la révolution. On peut dire et dans ce cas les sens est littéral : « C’est toujours la faute à Voltaire ! », et on ne sera pas surpris de lire que le baron approuva le choix de Caton de bannir les philosophes (en valorisant le témoignage de Pline plutôt que celui de Plutarque). Sainte-Croix interprétait donc son temps en ayant recours aux modèles des anciens, mais était aussi novateur dans l’emploi des sources. Son ouvrage est une étape significative dans la constitution de la méthode historique, qui s’est imposée au cours du XIXe siècle mais qui trouve ses racines dans le siècle des lumières.
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